Juin 2019, au grès des courants




Lundi 27 MAI
Jour 1

Après deux jours passés à préparer les bagages, l'heure est venue de prendre la route.
Au programme cette année, une visite Chez Dedôme à Langres, le constructeur de mon side-car BMW-Ural, puis direction l'Auvergne pour une rencontre entre side-caristes du SCCF.

Ensuite tout est possible, je n'ai rien décidé à ce jour.
Seule certitude, je dois être de retour au travail le 2 juillet, soit plus d'un mois devant moi.

Au moment du départ, s'insinue toujours le doute, pourquoi partir ? pourquoi s'arracher à sa famille ? à son lit douillet ?

Pour affronter les incertitudes de la route ? les orages ? les dangers ?

Toutes les douleurs quotidiennes se réveillent en même temps, prétextes idéaux pour renoncer au départ, mais l'appel de la route est plus fort, une fois encore, je pars.


Il me faut en général une cinquantaine de kilomètres pour rompre l'attraction qu'exerce le confort du foyer, puis bercé par le rythme du bicylindre à plat, et l'enchaînement des virages, l'esprit se libère.

10h30, j'enclenche la première vitesse et je m'élance.
Prudemment, pour découvrir le comportement de l'attelage en charge.

J'ai 20 kgs de bagage sur la selle passager, regroupant le matériel de camping, et environ 50 kgs dans le panier, 20 kgs d'outillage et accastillage divers, 20 kgs de nourriture et boisson, 10 kgs de vêtements.

Une fois de plus j'ai décliné la "to-do-list" et ce que j'ai oublié ne me manquera pas.

Pour ce premier jour, j'ai tracé une étape de 400 kms, cela peut paraître peu, mais je n'emprunte que les petites routes, qui sont toujours les plus belles, et à 50 kms/h de moyenne pauses incluses, il me faut compter environ 8 heures pour arriver à destination.


Point de chute prévu, dans les environs de Sancerre, j'enchaîne un peu de pays d'auge, puis le perche, toujours superbe, Montmirail, Vendôme, Blois, puis une belle traversée de la Sologne ou la pluie agrémente mon trajet.


Derniers kilomètres dans les vignobles du Sancerrois, un régal pour les yeux.

Bilan de cette première journée au guidon : la machine se comporte bien.



En charge elle se révèle plus stable qu'à vide, elle tient mieux le cap et ne tire pas à droite.
j'évoquerai le sujet avec Pierre-Jean Dedôme pour adopter les bons réglages, compromis entre roulage à vide et en charge.

La 1200 GSA ne fait pas mentir sa réputation, elle est vraiment confortable, depuis que j'ai abaissé le guidon, je ne ressens plus de crampe dans la main droite, me reste à bien me détendre, cela viendra avec le temps, l'attelage est récent, il faut l'apprivoiser.

J'ai plusieurs fois apprécié sa grande facilité à faire demi-tour, un château vu du coin de l'oeil ? hop demi tour, allons voir cela de plus prêt, sans aucune appréhension tant la machine est maniable.

Les dépassements se font sur un souffle, et l'on a vite fait de se laisser emporter au delà des vitesses légales.

Seul réserve pour l'instant, j'appréhende encore les enchaînements rapides de grands virages, je sens bien que dans ce cas de figure, il faut manier l'ensemble à la poigne, et le contraindre en force  à l'accélération dans les virages à droite, mais je n'ose pas me libérer, je reste un peu entre deux eaux, sur des oeufs, cela demande à être travaillé.

Aux allures légales, la question ne se pose pas, mais parfois quelques "S" sur un rythme enlevé peuvent apporter bien du plaisir ...

Arrivé à destination sans encombre après environ 8 heures en selle, je suis encore assez frais.

Le temps de poser mes bagages, bâcher le side pour la nuit car on annonce des orages, demain sera un autre jour.




Mardi 28  Mai
jour 2

Apres une bonne nuit de repos, je reprends le guidon à 10 heures du matin, direction Langres, là ou réside M. Dedôme, constructeur de mon sidecar.
Départ sous la pluie, qui m'accompagnera toute la matinée.
je quitte le Nivernais, pour l'Yonne, le Morvan, la Cote d'or ...
Autant dire que par les départementales, les virages et les paysages s'enchaînent à n'en plus finir.



Vers 12 heures, pause sandwich à Montréal, j'en profite pour passer un pull, il ne fait que 11 degrés.
Je laisse passer le mauvais temps, tout en dégustant un sandwich, et je reprends la route sous le soleil.

Vers 15 heures, j'arrive à Langres, et je passe directement chez Dedôme pour faire connaissance.

L'accueil est sympathique, on discute side-car une petite demie-heure et je me dirige vers le camping de la Liez, ou j'avais déjà séjourné en 2017 lors de mon voyage vers la Slovénie.

A peine la toile de tente sortie de son sac qu'un vent de folie se monte, accompagné d'une grosse averse, j'avais pris soin de choisir un emplacement avec sanitaire et douche privatif, en définitive c'est là que je vais poser mon duvet.

Séance Bâchage du side-car, et hop direction la terrasse pour boire une petite bière en admirant la vue sur le lac.
S'en suivra une petite assiette de foie gras pour fêter ce second jour de route qui s'est déroulé à merveille.

Demain, révision du side-car, réglages châssis et changement des liquides de frein, puis direction l'Auvergne.
Sans doute en faisant une étape intermédiaire, j'ai environ 8 heures de petites routes à parcourir, et je ne suis pas au bagne !

Demain est un autre jour ;-)

Mercredi 29 mai
jour 3

9 heures, je suis au rdv.
Après une bonne nuit de sommeil, passée dans le local sanitaire ( privatif, on ne se refuse rien ), je décharge le side-car dans l'atelier Dedôme et laisse le maître des lieux dérouler sa partition.

Minutieux, organisé, perfectionniste, ce sont les mots qui me viennent de suite à l'esprit en le regardant travailler.
D'abord le changement des liquides de frein, il pompe, je remplis.
J'ai bien noté la méthode et serai à même de le refaire. Le freinage avant s'en trouvera grandement amélioré.

Ensuite la partie réglage du châssis, et grand bien m'a pris de prendre rdv, tout est à reprendre.

Apres 2 heures de travail et d'agréables discussions, un essai par le patron et le side-car est prêt à reprendre la route.



Je suis enchanté d'avoir rencontré le constructeur de mon side-car, un passionné qui sacrifie beaucoup à sa passion, et j'aurai plaisir à le rencontrer à nouveau.


Chargement terminé, on the road again !

D'emblée ce n'est plus la même machine, il va bien droit et demande beaucoup moins d'efforts pour être emmené, à 110 kms/h je lâche les mains, il ne tire plus à droite comme auparavant, de plus il enclenche les virages à gauche à la coupure des gaz avec une facilité réconfortante.

Le châssis reste souple et tangue toujours un peu, c'est sa conception, il faut le vivre tel qu'il est.

Je mets en pratique les conseils du spécialiste, rentrer 10 kms/h moins vite dans les virages à droite et en sortir 10 kmh plus vite, en bref, un virage que j'estimerais devoir négocier à 80, j'y rentre à 70, j'en sors à 90, de belles sensations dans les courbes !

Dans les virages à gauche, rentrer sans ralentir, et quand on se dit : " ça le fera jamais !!! " couper net les gaz, le side enroule le virage avec volupté.

La pratique apporte énormément de plaisir au guidon, le son rauque du flat a chaque sortie de courbe est enivrant.
Et puis quand on se loupe, on sort les rames et sauve qui peut !!

Allez, assez parlé technique, place à la beauté des régions traversées.

Aujourd'hui encore, j'ai été ébahi par le 16 / 9ème qui se déroule dans mon casque.

La D103 jusqu'à Francheville, puis la D7 m'offrent un festival de routes boisées, viroleuses à souhait et longeant de petits cours d'eau, le trip intégral !
S'en suit la Vallée de l'Ouch, les canaux, les péniches ...
Le tout sous un soleil enfin au rendez-vous.







Au final je rentre triomphal et usé en Auvergne, me jette sur google et trouve un petit camping à la ferme perdu dans les collines.
25 euros la nuit dans un chalet pour 6 personnes, avec une belle barquette de frittes.

Je suis repus !



Une demie-heure de marche afin de me détendre un peu après ces 5 heures de route, et en écrivant ces quelques lignes, je sirote une petite bière sur la terrasse.

elle est pas belle la vie ?

Demain j'arriverai au camping du rassemblement SCCF, j'en suis à à peine 2 heures de route ... et ce sera un autre jour.

Jeudi 30 Mai
Jour 4

en théorie, je ne suis qu'à quelques encablures du rassemblement SCCF à La Tour d'Auvergne.
Levé tard, Je me mets en route vers 11 heures.

Les belles routes s'enchaînent, et j'attaque rapidement les Monts du Forez qui m'offrent un festival de virages longeant des torrents, le tout sous des frondaisons rafraîchissantes.

Il n'en reste pas moins que, bien que le bitume soit irréprochable y compris sur les plus petits axes, les routes sont ardues et la moyenne peu élevée.

Ajoutez à cela de multiples déviations qui se succèdent avec plus ou moins de clarté du fait d'une course de rallye automobile, et rapidement, la perspective d'arriver en début d'après midi s'éloigne des champs du possible.

Après avoir pas mal jardiné, et tourné le dos à mon cap idéal, je décide de redescendre dans la vallée et de me réorienter sur des axes de taille moyenne.

S'en suit la visite de la ville de Thiers, jolie localité jadis fleuron de la coutellerie française et aujourd'hui en déshérence.

Les petites ruelles me font penser à celles de la Charité sur Loire et offrent des pentes redoutables.

En descente, j'y croiserai un conducteur de clio peu enclin à faire marche arrière, et la largeur ne permettant pas de se croiser, nous y enchaînerons les manoeuvres les plus ardues afin de ne pas froisser de la tôle.

Ouf c'est passé ! quelques photos du Creux de l'enfer, le plein et je rattaque des collines en direction de ma destination du jour.





c'est en définitive vers 17h30 que j'arriverai au camping.

Sont déjà sur place Kevin et Julie et leurs deux filles, les organisateurs du rassemblement, mais également Laurent et Dominique accompagnés de leur fille, Picolino et sa compagne, Eddielaurant et sa compagne, Pascal le président du SCCF ( je crois ) Benoit et sa compagne, Arnaud et sa compagne ainsi que ses 2 filles,Bernard et sa compagne ainsi que son petit fils Melvin.

Au final nous sommes 22 participants.

l'ambiance est tout de suite très sympathique, Kev m'aide à monter ma tente, ceux qui se connaissent se retrouvent, les autres font connaissances, j'aide à mon tour EddieLaurent pour le montage de sa tente.




Le premier apéro délie les langues, le barbecue chauffe déjà, les discussions vont bon train.

Je crois m'être couché vers 23 heures et avoir dormi du sommeil des anges.

Vendredi 31 MAI
jour 5

réveil en pleine forme, petit dej et expéditions commando pour aller chercher le pain.

Je monte comme passager dans le DJ Sport/Hayabuza de Laurent, Kev embarque benoit, Eddie Laurent adopte piccolino.

Autant le dire de suite, l'aller est déjà très rythmé, le retour quant à lui est tout simplement endiablé.

Kev et Laurent, tous deux au guidon de leurs machines de rallye qu'ils utilisent pour le championnat de France se tirent un peu la bourre, cet aller / retour de la Tour d'Auvergne à la Bourboule me restera longtemps en mémoire.

Accroché à la barre de maintien du DJ Sport, le panier lève dans les virages à droite, part en glisse dans les virages à gauche avec un hurlement de pneumatique à l'agonie, les courbes s'enchaînent sur un train d'enfer ... époustouflant.

J'ai désormais un aperçu des sensations que peut offrir un pilotage de side-car de course, et même si cela réveille le jeune qui sommeille en moi, je me rends bien compte que ma nature prudente ne me permettrait pas d'exploiter de tels engins.


Repas du midi au camps de base, et le mot n'est pas trop fort tant l'aménagement est d'envergure avec tonnelle et Barnum.

l'après midi, départ pour une première balade en groupe.

Ceux qui me connaissent savent que ce n'est pas mon exercice de prédilection, je suis un rouleur solitaire, mais je dois avouer qu'un convoi de side-car c'est beau à regarder serpenter sur les petites routes d'Auvergne.

Direction Superbesse, c'est surpeuplé et je me fais agonir par des gendarmes en Duster sous prétexte que je m'apprêtais à franchir un sens interdit sur un parking, certes, mais de là à me mettre la sirène et les Gyrophares ...

Bon j suis parti doucement, en faisant profil bas, n'ayant pas compris s'ils voulaient m'arrêter sur le côté ou pas, sous les invectives, j'ai fait le choix d'une retraite en douceur ...

Destination suivante le lac Chambon, y cohabitent baigneuses en bikini sous un soleil radieux et neige sur le haut des sommets.


Une petite limonade et nous reprenons la route.

Au retour, nous évitons les endroits touristiques, et pratiquons les petites routes.

Arnaud rencontre de problèmes de saccades moteur quand la température monte, il rejoint le campement tranquillement ( il fera 8 arrêts ) et nous terminons la balade.


Le soir, apéro et barbecue sous la tonnelle, ambiance blind test musical, super soirée entre gens de bonne compagnie et l'occasion de faire un peu connaissance avec chacun.

On parle de side-car surtout ...v'la le scoop :-)


Samedi 1er juin
jour 6

Aujourd'hui c'est pic-nic !

départ groupé vers 11 heures du matin, on se régale de petites routes viroleuses.
Arrêt au bord d'un lac, sandwichs, discussions, et l'on reprend la route.

Arnaud rencontre encore des problèmes de saccades sur son Pan-européan que l'on surnommera vite le Panne-européan :-), mais la Honda a plus de 200 000 kms et a bien du mérite de trimbaler toute la petite famille, plus le chien !




Belle balade une fois encore et retour au camping pour un Méga apéro suivi de magrets de canard au barbecue.

Avouons-le, Kev et Julie sont des virtuoses de l'organisation, le tout dans une ambiance coulée.

Laurent et Dominique ont amené un méga barnum qui permet de loger les 22 convives pour les repas, qui se terminera ce samedi soir là en soirée dansante pour les plus vaillants.



Dimanche 2 juin
jour 7

petit dej, rapidement suivi d'un dernier barbecue.
chacun plie le campement, les sides sont pleins, ou chargés sur des remorques, l'heure est au départ après un dernier café.




Pour ma part je reste sur place une nuit de plus.
Grosse erreur, je me retrouve seul sur place avec un gros coup de blues.

Moi qui suis plutôt solitaire de nature, je me sens d'un coup démuni.
Les bougres m'auraient ils soigné de mon agoraphobie ?
En tout cas j'ai rencontré ou revu de belles personnes qui me redonnent confiance en la nature humaine.

( je garderait en mémoire la blague de Kev sur les péripatéticiennes au régime afin de ne pas tomber dans le pathos :-).

Bien que je m'étais dit, c'est dimanche pas de moto mais du repos, je me fais quand même une petite virée d'une soixantaine de kilomètres pour chasser le bourdon qui me guette.

Je file à Bort les Orgues, à la recherche du temps perdu, du camping sur les bords de la Dordogne et du petit café nommé le tourloulou ou 30 ans plus tôt je séjournais avec ma 600 XTE Yamaha et des amis de l'époque.
Le camping a disparu, le petit troqué n'est plus qu'une maison abandonnée, mais l'émotion est bien là.

De retour au camping, un appel à la maison, et ma compagne me persuade de ne pas faire cap au nord mais au contraire de continuer mon voyage et de profiter au maximum des belles routes qui s'offrent à moi.

Nuit de réflexion, demain est un autre jour.

Lundi 3 juin
jour 8

Réveil à l'heure du soleil, 6h30 du matin,
c'est décidé je continue.

Pliage du campement, la journée s'annonce bien, la grande tente accepte de rentrer dans son sac de rangement du premier coup.

une douche, et déjà le side est prêt à partir.

Petite pluie pour démarrer et qui me suivra toute la matinée.

Au programme, départ de la Tour d'Auvergne et traversée du Sancy et des monts du Cantal.

Alors là attention, c'est du très très lourd.
La beauté du Sancy est sans pareil, une émotion pure et intacte submerge celui qui traverse ces massifs.

Les images se bousculent dans mon casque, les virages s'enchaînent sans fin dans un paysage déserté et aride, encore enneigé par endroits.



Il me semble que cette traversée du Sancy est à ce jour une de mes plus belles balades. Les monts du cantal, à nouveau boisés n'ont pas à rougir de leur attrait, et me mènent jusqu'à la pose du midi, qui m'offrira truffade, jambon de pays et tarte aux myrtilles.

l'après-midi, l'Auvergne continue de m'ensorceler, de virages en virages, de villages en villages, de collines en collines ...

Le beau temps est de retour, je me pose pour la nuit dans un camping confortable, je monte la petite tente dôme, et alors que je suis penché à l'intérieur j'entends derrière moi : " ah ! j'ai le même panier attelé à un Ural !"

Bondidiou, je partage une bière avec mon voisin d'emplacement, qui vient d'installer son combi.

Il vient de la montagne noire, passionné de side, de combi de 2cv ...
les sujets de discussion ne manquent pas.

Demain est un autre jour ;-)

Mardi 4 juin
jour 9

Ce matin je prends mon temps, double café et pain au chocolat, je trace mon itinéraire de la journée sur le coin de la table.

Toujours plus au sud, ce sera la traversée de l'Aubrac,


le vent s'est levé, les paysages changent encore, ensuite l'Aveyron, ravitaillement à Millau et recherche d'un point de vue sur le fameux viaduc que je n'avais jamais vu en vrai.


Quelques photos plus tard, j'oriente le nez du side à l'est, et me dirige vers les Cévennes, par les gorges de la Dourbie. Là encore un festival de sensations au guidon et des paysages montagneux qui me surplombent à m'en couper le souffle.







Posé pour la soirée dans un petit camping municipal, en bordure de torrent, visite à pied du vilage datant du 15 ème siècle ...

demain est un autre jour !

Mercredi 5 juin
jour 10

Hier soir j'entrais dans les Cévennes, ce soir j'en suis sorti.

Une journée pour traverser les Cévennes d'ouest en Est, par les plus petites routes.

Les montagnes sont magnifiques, la végétation y est dense, beaucoup de feuillus et d'ajoncs, et puis ces roches rouges qui nous surplombent sont impressionnantes.

J'ai tracé l'itinéraire par les petites routes, comme en Auvergne, mais le bitume est de bien moins bonne qualité, et le roulage difficile.

Une petite pause au mont Igual, et brutalement la température perd 10 degrés, il ne fait plus que 11°
Il est temps de ré-enfiler la combinaison de pluie.




il fait froid, mais il ne pleut pas,
Pour progresser dans ma conduite, je décide d'enrouler au mieux en utilisant les freins le moins possible, pas si simple ...

Les Cévennes m'épuisent, je fais une pause casse croûte au pied d'une église, depuis ce matin le vent souffle fort, en descente vent dans le nez, le side ralentit comme si je freinais !
Il faut se concentrer, je roule au bord du précipice pendant des heures, souvent sans parapet, et quand j'entends le garde-boue du side qui couche l'herbe, il ne faut pas aller plus prêt.
Les virages s'enchaînent sans fin, les ponts bordés de murets en granite ou l'on ne se croise pas.

Les locaux ont l'habitude et roulent en prenant toute la largeur de la route,
de loin ils voient le phare de la moto et se disent que ça va passer à l'aise, au dernier moment ils aperçoivent le panier ... crispation réciproque.

pas question de se relâcher, les routes sont très petites mais on y croise des semi-remorques chargés de bois, c'est l'occasion de se jeter sur les freins !

Petit à petit la végétation borde les routes et bouche les perspectives, je fatigue et me concentre sur ma conduite plutôt que sur le paysage.

Enfin le panneau ! fin des Cévennes et début de l'Ardèche.

Là j'ai tracé de si petites routes, qui montent très dur de surcroît, qu'après avoir passé la journée à 50 kmh, je suis réduit à alterner première et seconde vitesse.

Arrivée en haut de la colline, le décor change radicalement des Cévennes, plus de feuillus mais une pinède chaude et odorante.

Petite pause pour refroidir le moteur, et j'entame la descente.

Je suis fatigué et le plaisir n'y est plus. Pour ne pas risquer la faute d'inattention, je me décide à trouver une station essence et un camping pour la nuit.

Allez, je l'ai bien mérité, je prends un mobile-home pour la nuit, pas envie de monter la tente.

Je me jette dans la piscine, puis dans la douche, je grignote, demain sera un autre jour ;-)

Jeudi 6 juin,
Jour 11

Ce matin, je me suis levé tard, autant profiter au maximum du confort du Mobile-home :-)

Départ vers 10h30, tranquillement, sur les petites routes d'Ardèche.

D'emblée je remarque que tout a changé, la végétation, les constructions.

Autant les Cévennes semblent sur la défensive, avec une architecture fortifiée, des toitures de Lauze à l'épreuve des hivers, et une nature assez aride, ou les champs sont semés de rocher, autant l'Ardèche du sud se détend et profite du soleil.






Les arbres fruitiers sont nombreux, figuiers, cerisiers, noyers, et la vigne agrémente le paysage de ses alignements.
Les Lauzes ont cédé la place aux tuiles canale, c'est le sud.

Les routes sont encore assez cahoteuses, mais moins que dans les Cévennes.

Vers 13h, je m'arrête dans une petite épicerie, baguette de pain, jambon et fromage de pays, quelques tomates grappe et je file dans les collines grignoter un excellent sandwich.

Je reprends la route et me dirige vers le Mont Gerbier de Jonc, là ou la Loire prends sa source, petit à petit je bascule en Ardèche du Nord, plus semblable aux Cévennes, plus rustique.



Fin de l'Ardèche, et retour en Auvergne, je me trouve un petit camping à la ferme, ou le propriétaire entretient un musée des outils agricoles et un moulin à grain animé par une source en état de marche.

A 84 ans il a bon pied bon oeil, je lui offre un bière et nous discutions une petite heure de choses et d'autres, il me dit comme il est dure pour les paysans de trouver une femme, se marre du voisin qui a participé à "l'amour est dans le prés" mais est rentré bredouille, une tranche de vie.


Il commence à faire un peu frais, ici souffle la Burle, et nous sommes sur le territoire de la bête du Gévaudan, il est temps de grignoter et de s'abriter sous la tente.

Demain je termine l'Auvergne, me reste à décider quoi faire ensuite,... demain sera un autre jour.

Vendredi 7 juin
jour 12

La Burle ...
au pays de la bête du Gévaudan, la Burle, c'est le vent qui rend fou.
L'hiver il pousse la neige et l'amasse en permanence en congères infranchissables.

La Burle, justement, j'ai eu l'honneur de la découvrir.

Une nuit ou le vent souffle en continu, fort, inlassable.
Pas le vent de chez nous en Normandie, celui en rafales qui vient de la mer, non, la Burle c'est un vent continu, qui ni ne faiblit ni s'amplifie, un souffle permanent qui épuise les arbres et les fait chanter des heures sans discontinuer.

J'avais opté pour un emplacement enchâssé entre des murs de pierre pour poser la tente, coup de chance, j'ai été abrité.

Le matin venu, la Burle souffle toujours, et je ne sais pas si elle m'a lavé la tête mais je décide de rentrer.

Je suis comme ça, l'envie de retour me prend toujours à l'improviste, irrépressible.

Je plie le campement, charge le side-car, salue mon hôte pour une nuit et je file.

La journée est annoncée alerte orange pluie et vents sur toute la France, ça tombe bien, je dois en traverser les trois quarts.

Direction Clermont-Ferrand, Aubusson, Châteauroux, Tours le tout par les nationales.

Il me faudra 13 heures non stop, sauf les pauses carburant et un macdo pour revenir à mon port d'attache.

13 heures sous une pluie diluvienne, un vent de folie, et les arbres qui se liguent contre moi et passent leur temps à jeter des branches sur mon passage.

Une belle occasion de me tester, au guidon du side, ainsi que d'évaluer mon équipement en conditions défavorables.

Tout à tenu, la veste Klim, la salopette de bateau Décathlon, les bottes Sidi Adventure, les poignées chauffantes, je suis arrivé à bon port absolument sec après 13 heures de déluge.

Étonnamment, c'est à peine fatigué que je descends du side-car, quelques raideurs ici ou là, car il a fallu lutter contre le vent, mais pas de sentiment de fatigue.

Cette BMW GS Adventure ne fait pas mentir sa réputation, c'est une bête à avaler du kilomètre.

Voilà, je suis rentré, me reste à trier les photos, à décanter toutes ces images qui se bousculent encore dans mon cerveau.

Ce qui est certain, c'est ce sentiment d’apaisement qui domine après 12 jours d'errance et de liberté.

Je suis bien

Demain est un autre jour, je sais qu'il me faudra repartir...